Les cendres mettent en évidence le néant qui se cache derrière la poursuite effrénée des récompenses mondaines. Elles nous rappellent que la mondanité est comme la poussière, qui est emportée par un petit vent. Sœurs et frères, nous ne sommes pas dans ce monde pour courir après le vent ; notre cœur a soif d'éternité. Le Carême est un temps qui nous est donné par le Seigneur pour revenir à la vie, pour être guéri intérieurement et pour marcher vers Pâques, vers ce qui ne passe pas, vers la récompense auprès du Père. C'est un voyage de guérison. Non pas pour tout changer du jour au lendemain, mais pour vivre chaque jour avec un esprit nouveau, avec un style différent. C'est à cela que servent la prière, la charité et le jeûne.

La prière humble, faite "en secret" (Mt 6,6) devient le secret pour faire fleurir la vie au dehors. C'est un dialogue chaleureux d'affection et de confiance, qui réconforte et ouvre le cœur. En particulier en ce temps de Carême, prions en regardant le Crucifié : laissons-nous envahir par la tendresse émouvante de Dieu, et plaçons nos blessures et les blessures du monde dans ses blessures. Ne nous laissons pas prendre par la précipitation, c'est "le secret de l'amour", loin de toute ostentation et de tout ton tapageur.

Si la prière est vraie, elle ne peut se traduire que par la charité. Et la charité nous libère du pire des esclavages, celui de nous-mêmes. Elle nous ramène à l'essentiel, à la joie intime qu'il y a à donner. L'aumône, faite loin des projecteurs, donne la paix et l'espoir au cœur.

Enfin, le jeûne. Ce n'est pas un régime, au contraire, il nous libère de l'autoréférence de la recherche obsessionnelle du bien-être physique, pour nous aider à garder en forme non pas le corps, mais l'esprit. Le jeûne nous ramène à donner la juste valeur aux choses. De manière concrète, il nous rappelle que la vie ne doit pas être assujettie à la scène passagère de ce monde. Et le jeûne ne doit pas se limiter à la nourriture : en particulier pendant le Carême, il faut jeûner de ce qui crée une dépendance. Pensons-y tous.

La prière, la charité et le jeûne mûrissent en secret, mais leurs effets ne sont pas secrets. La prière, la charité et le jeûne ne sont pas seulement des médicaments pour nous, mais pour tous, car ils peuvent changer l'histoire. Tout d'abord parce que ceux qui en expérimentent les effets, presque sans s'en rendre compte, les transmettent aussi aux autres ; et surtout parce que la prière, la charité et le jeûne sont les principaux moyens qui permettent à Dieu d'intervenir dans notre vie et dans la vie du monde.

Seigneur, Toi qui vois dans le secret et qui nous récompenses au-delà de toutes nos espérances, écoute la prière de ceux qui se confient en Toi, surtout les plus humbles, les plus éprouvés, ceux qui souffrent et fuient sous le fracas des armes. Redonne la paix à nos cœurs, redonne ta paix à nos jours. Et qu'il en soit ainsi.

(extrait de l'homélie du Pape François, Basilique Santa Marta)